TERRE SAINTE, CŒURS DIVISÉS

COMMENT LES CHRETIENS D’OCCIDENT
NAVIGUENT FACE AU CONFLIT ISRAELO-PALESTINIEN ?

Alors que les prières pour la paix s'élèvent des églises d'Occident, la Terre Sainte demeure un épicentre de tensions. Pour les chrétiens occidentaux, le conflit israélo-palestinien n'est pas qu'une question politique ; il résonne avec les fondements de leur foi, l'histoire biblique et leur interprétation du plan divin. Loin d'être unanimes, leurs positions forment un éventail complexe : d'un appui inconditionnel à Israël à une forte solidarité avec la Palestine, en passant par des demandes nuancées de justice et de réconciliation. 

Ce lundi 22 septembre 2025, devant l’Assemblée générale de l’ONU, Emmanuel Macron a annoncé que la France penchera pour une reconnaissance de la Palestine comme un Etat de plein exercice. Le gouvernement français franchi un cap décisif, mais pour le chrétien d'Occident doit-il ou peut-il choisir son camp ? Comment expliquer cette variété de points de vue ? Quel est l’impact d’une telle déclaration sur le débat public et les décisions internationales ?

Nous vous proposons une toute nouvelle formule d’article pour la rentrée, un dossier sur le sujet en deux volets. Commençons par l’histoire.

PARTIE 1 : L’HISTOIRE DU CONFLIT

Une suite de déconvenues à l’origine du conflit

Pour saisir les racines de ce conflit incessant, évitons une analyse historico-biblique trop complexe. Retenons deux éléments fondamentaux : la Palestine (berceau du Judaïsme, Christianisme, et de l’Islam) est une région, non un État aux frontières établies – une distinction notable. Cette région est issue d'un partage colonial problématique. De plus, une présence juive à Jérusalem est attestée depuis le roi David, bien avant l'apparition de l'islam. Par la suite, des peuples nomades ont transité (Assyriens, Perses, Grecs), puis les Romains ont occupé la région, entraînant plusieurs déportations (dont certaines sont majeures, au VIème siècle avant J-C, au 1er siècle après J-C, durant la période romaine, et au IIème siècle après J-C, suite à la révolte de Bar Kokhba), ce qui entraine l'interdiction des juifs de la ville sous peine de mort. L'antisémitisme est un phénomène ancien.

La déportation des Juifs de Jérusalem n'a pas entraîné un exode complet ; un petit nombre est demeuré et s'est assimilé. Par la suite, l'arrivée des Turcs et la présence de clans arabes sous l'Empire Ottoman ont permis une installation pacifique et une vie commune sans incident avec les Juifs de la région.

Mais alors, quand tout cela a-t-il commencé ?

Quatre événements majeurs sont à l'origine de cette discorde.

  1. Des pogroms (1881) et deux guerres mondiales : Les Juifs occidentaux victimes d'un rejet massif ne sont pas les mêmes que ceux restés à Jérusalem. Ces nouveaux Juifs d'Europe (Russes, Polonais, Français, Allemands), confrontés à une violence extrême (pogroms, extermination nazie), comprennent la nécessité d'un foyer national pour survivre et s'organiser. Il leur faudrait donc une terre d’asile, se regrouper et se constituer en nation.

  2. 1894 : la machination judiciaire : L'affaire Dreyfus, un traumatisme social majeur, provoque la tenue du premier congrès sioniste. Celui-ci développe une lecture politico-biblique influente. Théodore Herzl, le fondateur de l’idéologie politique sioniste, est convaincu qu'une troisième reconstruction du temple de Salomon est essentielle, et que la diaspora juive, bien que menacée, est la plus légitime pour la réaliser. Un retour messianique des Juifs à la ville sainte aurait une signification considérable.

  3. 1920 : Les mandataires britanniques, et la colonisation française : La conception coloniale des puissances britanniques et françaises aboutit à une promesse paradoxale à deux peuples. Leurs intérêts les poussent à attribuer une terre commune mal définie, ignorant les droits fondamentaux des populations concernées. Juifs et Arabes se voient accorder le droit de créer leur propre nation sur ce même territoire, sous l'observation passive de la Société des Nations, puis tard de l'ONU. Ces dernières, tiraillées entre la culpabilité liée au sort des Juifs en Europe et le désir de préserver leurs liens avec les pays arabes indépendants, riches en or noir, ferment les yeux sur les tensions naissantes.

  4. La notion diasporique et du droit du sol : Tous les juifs ne sont pas Israéliens, puisqu’avant 1948 l’Etat d’Israël n’existait pas. Et beaucoup de Palestiniens sont nés sur les territoires de l’Israël actuel. Tous les Israéliens ne sont pas Juifs, certains sont chrétiens, et tous les palestiniens ne sont pas arabes ou musulmans, et des terroristes. Terres plurielles, la Palestine ne s’appelait à l’existence que dans le regard des ethnies claniques nomades solidaires. A l’arrivée de la diaspora juive, deux postures se confrontent, d’un côté les berbères qui sont « archaïques » dans leurs pratiques cultuelles et culturelles, et les juifs européens, cette élite, qui a évolué dans une société occidentale post siècle des lumières, « évoluée » instituée, organisée.

En 1948, avec la reconnaissance de l’Etat d’Israël par l’ONU, le retrait des puissances coloniales, et la Nakba, le grand exil provoqué des palestiniens, il n’y aura désormais plus de paix au Proche-Orient, malgré les nombreuses tentatives de réconciliation envisagées. (Accords de Camp David (1978), Conférence de Madrid (1991), Accords d’Oslo (1993-1995), Initiative de Paix Arabe (2002)).

Les actes de violence de part et d’autre alimentent la méfiance et rendent toute négociation très difficile. Car les obstacles à la paix sont nombreux : l’expansion des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens violant le droit international, le statut de Jérusalem, capitale revendiquée par les deux parties, le droit au retour des réfugiés palestiniens, la sécurité d’Israël, la division palestinienne, la rivalité entre le Fatah en Cisjordanie et le Hamas à Gaza.

La Question Épineuse : Faut-il Choisir Son Camp ? Les Défis Éthiques et Théologiques

La question de savoir si un chrétien d'Occident doit prendre parti pour Israël ou pour les Palestiniens est au cœur de nombreux débats et dilemmes moraux au sein des communautés chrétiennes. Une réponse simple et tranchée est rarement satisfaisante, car elle risque de négliger la complexité du conflit et les impératifs éthiques de la foi chrétienne.

Les Arguments en Faveur d'un Soutien à Israël : Foi, Histoire et Sécurité

Pour certains chrétiens, le soutien à Israël découle de convictions théologiques (comme évoqué précédemment avec le sionisme chrétien), d'une reconnaissance des liens historiques et religieux du peuple juif avec la Terre Sainte, et d'une perception d'Israël comme un État démocratique menacé dans une région instable. Ils peuvent mettre en avant le droit d'Israël à se défendre contre le terrorisme et à assurer la sécurité de ses citoyens. Pour eux, prendre parti pour Israël peut être vu comme un acte de fidélité aux promesses bibliques et un soutien à une nation qui partage des valeurs occidentales.

Les Arguments en Faveur d'un Soutien aux Palestiniens : Justice, Droits Humains et Solidarité

D'autres chrétiens estiment que leur foi les appelle à se tenir aux côtés des Palestiniens, qu'ils considèrent comme un peuple opprimé et privé de ses droits fondamentaux. Ils mettent en avant les violations des droits humains, l'occupation des territoires palestiniens, le blocus de Gaza et la situation des réfugiés. Pour eux, la justice, la compassion pour les victimes et la solidarité avec les plus faibles sont des impératifs évangéliques qui les poussent à soutenir la cause palestinienne. Ils peuvent critiquer les politiques israéliennes et appeler à la fin de l'occupation et à la reconnaissance des droits nationaux des Palestiniens.

Mais est-ce un choix manichéen ? Le bien contre le mal ? Qu’en est-il des prédictions bibliques à ce sujet ?

Rendez-vous dans le volet 2 très bientôt.

Laurence ROGER pour
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