ÉVANGÉLIQUES : UN SUCCÈS PAS SI ANGÉLIQUE ! BREF
26 septembre 2025 - 12:34 - 4293vues
UNE FORTE DOSE DE N'IMPORTE QUOI !
Jeudi 25 septembre 2025, France 2 a diffusé dans son magazine Envoyé Spécial un reportage intitulé Évangéliques : un succès pas si angélique. Vous l’avez loupé ? Bon, c’est pas trop grave au fond, vous pourrez le voir en replay.
Mais il faut dire que ce sujet sensible, dès son annonce sur les réseaux sociaux, avait attiré les regards et suscité des réactions, notamment du côté de l’Église MLK qui, avant diffusion, a publié un communiqué appelant ses fidèles à la vigilance face à ce qu’elle considérait comme une approche orientée, tout en annonçant se réserver un droit de réponse. Drôle d’ambiance !

© France TV - Screenshot reportage
Ces réactions surprenantes ont confirmé que Blue Melody School Radio ne devrait en aucun cas louper cet épisode de l’émission à succès. Curieux de comprendre ce que ce documentaire avait réellement à dire, nous avons choisi de le regarder sans a priori et nous sommes attelé à avoir un regard neutre. Mais rapidement, notre constat rejoint celui de nombreux observateurs.
DES INTENTIONS HONORABLES MAIS UN RÉSULTAT DÉCEVANT
Le reportage s’ouvre avec Élise Lucet dans une église catholique, insistant sur la baisse de fréquentation pour mieux mettre en valeur le succès croissant des églises évangéliques. Une maladresse dont on aurait pu se passer, surtout que l’information est en partie erronée. Car si la pratique catholique connaît une érosion dans certains contextes, l’Église catholique connaît parallèlement un renouveau dans les vocations et les baptêmes. En 2025, la Conférence des évêques de France fait état d’une hausse de 45 % des baptêmes d’adultes et de 33 % pour les adolescents, avec une forte vitalité chez les moins de 25 ans. Ce type d’information, absent du reportage, aurait apporté un équilibre bienvenu. (Information confirmée par de nombreux médias dont Le Monde, France Bleu, Le Figaro, …)
ENTRE CARICATURE ET SENSATIONNALISME
Très vite, l’enquête tombe dans une forme de caricature. Les caméras insistent sur l’usage des technologies, sur les moyens artistiques et scéniques employés dans certains cultes évangéliques, comme si moderniser la forme revenait à trahir le fond. Quelle hypocrisie ! Tout le monde sait que ces outils ne sont rien d’autre que des moyens mis au service d’un message spirituel. Faut-il vraiment s’étonner qu’en 2025, des communautés utilisent la vidéo, la musique live ou des compétences professionnelles pour diffuser leurs offices en ligne et toucher un public plus large ? Alors dites-nous… c’est pêché ?
Et Martine, vous l’avez vue ? Penchons-nous sur son cas. En réalité, des Martine, il y en a partout, dans toutes les communautés et quelle que soit l’obédience. Martine, c’est de celles qui vivent leur foi avec ferveur, qui puisent dans l’église des réponses et un équilibre, surtout quand la vie n’a pas été tendre, quand les épreuves se sont multipliées et que rien ne semblait sourire. Et pourtant, c’est la foi en Christ qui a tenu bon, qui a relevé, qui a sauvé. What else ?

© France TV - Screenshot reportage
Ce qui est présenté comme inquiétant n’est, au fond, qu’une adaptation de la foi à son époque. Voir des fidèles heureux, enthousiastes, passionnés n’a rien de scandaleux : c’est le propre de toutes les religions. D’ailleurs, la ferveur est aussi palpable lors des grands rassemblements des Journées mondiales de la jeunesse organisées par l’Église catholique, dans les grands rassemblements des gens du voyage, et même dans les cités, où les jeunes musulmans expriment de plus en plus librement leur foi… encore heureux ! C’est aussi ça, la foi, non ? De l’islam au judaïsme, en passant par le catholicisme, les Mormons, les Témoins de Jéhovah ou les Adventistes, la ferveur et la joie de croire sont universelles, qu’on se le dise.
UN CHOIX ÉDITORIAL QUI INTERROGE
Plus discutable encore est le choix des journalistes de conclure leur sujet sur la question de l’homosexualité. Là encore, le traitement semble parfaitement orienté. Présenter les évangéliques comme systématiquement opposés à l’homosexualité revient à ignorer que cette position est partagée, sous des formes diverses, par de nombreuses traditions et mouvements religieux. Le Lévitique appartient autant à la Bible qu’à la Torah, et l’islam considère également l’homosexualité comme un péché dans sa tradition juridique. Même l’Église catholique, par la voix du pape François, a rappelé que l’homosexualité est un péché mais non un crime. Dès lors, pourquoi stigmatiser une communauté particulière quand il s’agit d’une position largement répandue dans le paysage religieux mondial ?
Il y a, en effet, matière à s’interroger. L’homosexualité demeure un sujet sensible qui cristallise les débats dans la société. Or, plutôt que de chercher à apaiser, à comprendre et à analyser les différentes approches portées par les mouvements religieux, le reportage semble avoir choisi la voie de la confrontation. Pourquoi prendre à partie ? Pourquoi stigmatiser, alors même que toutes les religions reposent sur des croyances et des valeurs fondamentales qui constituent leurs socles et qui visent, chacune à leur manière, un idéal d’élévation ? Où est la faute dans le fait de s’appuyer sur ces convictions pour donner sens et orientation à une vie de foi ?
Dans tout mouvement, on y croit ou on n’y croit pas. Tout est une question de foi. C’est d’ailleurs la raison de la pluralité des mouvements religieux, spirituels ou philosophiques : il y en a pour tout le monde. Et alors ? Non, Élise, sur ce coup-là, ce n’est pas très futé comme démarche.
LES VRAIS SUJETS RESTENT DANS L'OMBRE
Le plus regrettable se situe ailleurs. En effet, les véritables pistes d’investigation ont été à peine effleurées, et c’est dommage. Oui, certaines communautés évangéliques (et pas seulement…) posent problème, notamment lorsqu’elles placent l’argent ou le contrôle des fidèles au-dessus de la foi. Il existe des dérives, et elles doivent être dénoncées avec force.
Mais pourquoi ne pas avoir exploré ces réalités en profondeur, quitte à recourir à des méthodes plus incisives, comme les caméras cachées, déjà employées par Envoyé Spécial dans d’autres enquêtes ? L’émission sait parfaitement comment le faire, c’est une technique journalistique maîtrisée par leurs équipes.
Pourquoi ne pas avoir élargi le spectre à d’autres grandes églises, comme ICC ou ACER, entre autres, afin d’offrir une vision plus représentative et nuancée du paysage évangélique français ? Dommage : celles et ceux qui ont accepté de participer à ce reportage se sont retrouvés instrumentalisés. Merci pour la confiance accordée !
L'ÉGLISE MLK, LE MAUVAIS BOUC ÉMISSAIRE DANS L'HISTOIRE, ET PAS QUE ...
Le reportage d’Envoyé Spécial a choisi de mettre en lumière l’Église MLK et son pasteur principal, Yvan Carluer. Selon nos informations, lorsque l’équipe d’Élise Lucet a proposé de réaliser ce sujet, les responsables de la communauté se sont interrogés sur l’opportunité d’accepter la présence des caméras de France 2. Mais, fidèles à leur démarche de transparence et n’ayant rien à dissimuler, ils ont finalement ouvert les portes de l’église sans réserve.

© France TV - Screenshot reportage
Il faut rappeler que l’Espace Grand Paris n’est pas uniquement destiné aux offices religieux. Conçu comme un lieu multifonctions, il accueille également des activités culturelles, des concerts, des conférences et divers événements. Dès sa conception, une attention particulière a été portée pour que l’infrastructure réponde à cette diversité d’usages et offre des conditions dignes d’un équipement de cette envergure.
Au final, une question demeure. L’Église MLK est la seule communauté à avoir accepté d’ouvrir ses portes sans réserve aux caméras. Elle se retrouve ainsi en première ligne, exposée comme un cas emblématique, mais aussi comme un bouc émissaire. Le résultat laisse le sentiment d’un reportage orienté, dont les investigations préalables semblent incomplètes, voire bâclées. Mais… s’ils savaient !
Ont-ils seulement conscience d’être passés à côté du véritable sujet, alors que les églises à l’origine de « problèmes » sont bien connues, tant de la place publique que du milieu protestant ? Il suffisait, au fond… de demander.
ET LES RÉACTIONS VIVES ...
Les réactions ne se sont pas fait attendre. Le CNEF (Conseil national des évangéliques de France) a annoncé avoir saisi le ministère de l’Intérieur et prépare un signalement auprès de l’ARCOM. De son côté, l’Église MLK avait déjà exprimé sa volonté de participer à un débat public, à condition qu’il se déroule dans le respect de la charte déontologique applicable à tout journaliste. La Fédération protestante de France (FPF) a, elle aussi, fait part de « sa vive préoccupation » face à « des méthodes journalistiques contestables » et au « risque d’amalgames préjudiciables ». Le journal La Vie titre d’ailleurs que « la caricature ne passe plus » (à lire ici), tandis que plusieurs autres médias relaient le trouble évident provoqué par ce reportage controversé.

© CNEF - Screenshot Instagram
Sur les réseaux sociaux, les réactions se multiplient. David Antoine, créateur de contenu et kinésithérapeute de profession, interviewé dans le cadre du reportage, s’était livré avec sincérité et naturel, ouvrant les portes de son quotidien avec authenticité. Or, le traitement qui en a été fait laisse entendre qu’il appartiendrait à une bande d’illuminés jouant une comédie autour de la foi. Une présentation jugée injuste par beaucoup. On peut lui reprocher certaines idées, perçues par certains comme extrémistes, ainsi qu’une vision assez rigide et une expression de la foi parfois trop intense. Mais en revanche, David Antoine reste cohérent et authentique, fidèle au partage régulier de ses convictions sur ses réseaux sociaux, sans artifice. Lui aussi a réagi en publiant une vidéo relayant les nombreux témoignages d’internautes indignés par le reportage.
UN RENDEZ-VOUS MANQUÉ
C’est donc, au final, ce que l’on retiendra : un documentaire qui laisse le goût amer d’un rendez-vous manqué. Et allons droit au but. Oui, ce reportage est injuste, insincère, clairement à charge, bâclé, très orienté et construit sur une série de raccourcis. On en vient presque à se demander s’il n’a pas été commandité. Pourquoi ? L’avenir nous le dira peut-être. L’enquête avait tout pour être passionnante et utile, mais elle s’est contentée d’un traitement sensationnaliste, manquant de rigueur et de profondeur.
Nous ne remettons pas en cause le professionnalisme des journalistes qui ont contribué à ce sujet. Toutefois, il faut souligner une erreur de fond, et non des moindres. L’évangélisme, rattaché au protestantisme, se décline en plusieurs courants distincts : anabaptisme, baptisme, pentecôtisme, mouvement charismatique, mouvement néo-charismatique… et l’on pourrait en citer d’autres. Cette diversité aurait dû constituer le point de départ de l’enquête, plutôt que de donner l’impression de réduire l’ensemble du mouvement à une seule et même réalité.
Alors oui, il y a de la déception. Celles et ceux qui ont ouvert leurs portes en toute sincérité se retrouvent instrumentalisés. Et c’est dommage. À terme, cet épisode risque de générer une méfiance durable des institutions religieuses vis-à-vis des médias. Dès lors, il deviendra difficile de mener des enquêtes sérieuses et de dénoncer les véritables dérives.
Or, les dérives au sein des mouvements religieux, et plus particulièrement dans certaines églises protestantes évangéliques, constituent un sujet trop sérieux pour être traité à la légère. Il appelle un regard minutieux, une analyse approfondie, une parole sincère et un ton véritablement neutre. Qu’on se le dise.
Dommage, car Envoyé Spécial s’est forgé une réputation sur la solidité de ses investigations. Cette fois-ci, le travail apparaît incomplet, voire bâclé, et ne rend pas justice à la complexité du sujet.
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